Silence, on crie !

Il aime prendre rendez-vous du jour pour le lendemain car sinon, il angoisse trop. Dès que je le vois se matérialise l’image d’une gerbille inquiète : il a un visage pointu, de petits yeux marrons mobiles, l’air fébrile et des mouvements saccadés, surtout lorsque son trouble monte.

Quand je lui laisse mes pieds, il s’en empare brusquement, les palpe à toute allure avant de les embrasser à petits bécots crispés, loin, très loin de toute sensualité.
Souvent il me regarde en se tripotant les tétons et en soufflant « Ooooh Maîtresse, ooooh, c’est bon Maîtresse ! »
Souvent il agite sa main droite – jamais la gauche – avec frénésie, comme s’il venait de se brûler et tentait de faire baisser la température.
Souvent il remue la tête et les membres en tous sens, à mi-chemin entre le lit de clous et la crise d’épilepsie.

Au début je croyais qu’il avait très mal. J’avais peur qu’il s’évanouisse, voire pire, car il n’a pas l’air très en forme. À chaque séance, je redécouvre que ses manifestations incontrôlées ne sont que des expressions de son plaisir mêlé de stress.
Je crois aussi qu’il n’a qu’une vague conscience de son corps, et le besoin de réfréner ses cris. Par habitude ? Volonté de garder un semblant de contrôle ? Crainte de déranger les voisins ? Je l’ignore. Le fait est que sans crier gare, entre deux gémissements de presque agonie, il se bâillonne de sa paume ou se fourre les doigts dans la bouche.
Perturbant.

Hier, allongé jambes écartées, il s’est mis à battre des bras. On aurait dit une caricature de nageur olympique lancé à pleine puissance hors de l’eau. Je l’observais en l’enculant, à mi-chemin entre l’incrédulité et la fascination, quand sa main a percuté un objet sur le sol. Il l’a repêché avant de se l’enfoncer en travers de la bouche.
L’objet, c’était quatre boules anales serties dans une tige en silicone.

J’ai alors contemplé, entre deux coups de rein au bord du fou rire, ma gerbille inquiète se contrôler avec une boule de cul, pendant que la tige de l’objet lui flanquait des gifles.
C’était le comble de quelque chose, oui, mais de quoi ?