Toyboy – Soie ma chose

Toyboy avait pour consigne de me fixer un lieu de rendez-vous facile à trouver dans cette ville inconnue.
– La terrasse du café Z, métro **, avait-il suggéré.
À l’heure dite, je sors du métro. Ballets de parasols et serveurs pressés, groupes en short et Coca tiède, il s’agit bien de l’un des quartiers les plus populaires de la cité. Toyboy, croyant que je veux découvrir ce pour quoi les touristes viennent, me guide sur une avenue bondée, une de ces voies qui, comme Le Marais ou Saint-Germain de Prés, ont perdu leur âme à mesure qu’elles ont gagné en fréquentation.
À Paris, Bangkok, Bali ou Berlin, c’est exactement les lieux que j’évite – sauf que Toyboy, désireux de bien faire, ne peut pas le savoir.
– Allons ailleurs, dis-je. Dans les quartiers où toi qui vis ici, tu traînes.
C’est ainsi qu’en fin d’après-midi, gorgés de soleil et de fatigue, nous nous retrouvons dans un grand parc. Je décide alors de transformer Toyboy en porteur de sacs trop lourds, puis d’ôter mon long foulard pour en nouer l’extrémité autour de son cou.
– Un collier en soie, mais quelle chance tu as ! lui soufflé-je à l’oreille alors que son sexe, prompt à s’ériger à la moindre sollicitation, déforme son short.
J’empoigne le noeud de ma laisse soyeuse puis sa bride, à laquelle j’imprime un coup sec.
– Debout ! Marche derrière moi, à mon rythme, tête et épaules basses !
Un pas, deux pas, dix et cent, nous voici à flâner dans les allées, drôle de remake public de « walk my German dog ». Certains regards, indifférents, ne remarquent même pas la laisse ; d’autres, amusés ou interloqués, rient de voir un si grand garçon promené par une si petite femme si décidée ; d’autres, entendus, devinent très bien le genre de jeux qui nous unit.

C’est en haut des escaliers que je m’apprête à descendre comme une Reine, un bras battant la mesure de mon pas martial et Toyboy dans mon sillage, qu’un jeune homme lui lance :
– Oh, toi… Tu es puni, c’est ça ?
– Oui, je suis puni !
Dans ces quatre mots-là, il y a toute la fierté de la docilité. Fierté d’être un chien ou un objet puni par mes soins, tant la punition importe moins que la personne qui l’inflige.

Photo de William Wegman.